
LE GROGNEMENT DE L’OURS (extrait) La joie du naufrage Tu marchais vers moi chantant une comptine que je ne connaissais que trop bien. Pourquoi l’avais-je oublié ? Comment avais-je pu l’oublier ? Elle qui avait toujours été là comme un battement de cœur au cœur de ma vie. Tu m’as pris dans tes bras d’obscurité et ton visage de vacuité a effacé le mien. J’ai lutté contre ton baiser en sachant que je n’avais jamais désiré que lui. Le moment où tout s’effondre. Je me rappelle... cette nuit de vinasse sans fin au casino de ma vie, ayant tout joué, la cupidité au fond des yeux pour tout perdre dans un effrayant soulagement. Je ne t’ai pas reconnu. Je me rappelle… mendiant ces misérables hochets suintants les promesses cadavériques d’un futur inexistant, refermant mes mains sur du vent avec une stupeur viscérale. Je ne t’ai pas reconnu. Je me rappelle… cet instant de diamant où dans la blancheur indifférente d’un spécialiste résonnaient les mots 'tumeur terminale...